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El Día de los Muertos au Michoacán
El Día de los Muertos au Michoacán
D’une région à l’autre, divers villages célèbrent le « Día de los Muertos », chacun ayant ses particularités. Cette fête populaire typiquement mexicaine a été classée au Patrimoine immatériel de l’Humanité par l’Unesco en 2003. Elle est célébrée chaque année les 1er et 2 novembre mais la tradition n’est pas aussi forte sur tout le territoire. Autour de la capitale, ce sont les habitants du village de Mixquic qui en font une fête magnifique.
Parmi les lieux les plus populaires pour vivre le Día de los Muertos, Patzcuaro dans le Michaoacan est sans aucun doute le plus fréquenté et le plus réputé. Il faut d’ailleurs s’y prendre 1 an à l’avance pour espérer pouvoir se loger sur place. Et même quand l’on s’y prend tôt, rien n’est gagné, comme nous l’avons malheureusement expérimenté : fausses annonces de location, prix de votre réservation triplé à quelques semaines du jour J sans prévenir, bref, après quelques déboires, le seul logement que nous trouvons disponible pour ces dates se trouve quand-même à 1h de route, à Morelia (ville magique que nous avions de toute façon prévu de visiter durant notre séjour). Qu’à cela ne tienne, rien ne nous empêchera de participer à l’évènement, même si cela veut dire le faire uniquement en journée. C’est déjà une grande chance ! Nous ferons les aller-retours depuis notre magnifique petite villa typique de Morelia.
Nous voilà donc partis pour le Día de los Muertos dans le Michoacan, en ce début novembre.
Chaque foyer dispose de son autel avec ses ancêtres en photo, directement devant la maison dans la rue ou dans le foyer.
Nous commençons notre périple le 1er avec la visite de Patzcuaro et de l’île de Janitzio. Avec leurs façades blanches et leurs toits de tuile, ces villages nous rappellent San Cristobal de las Casas au Chiapas. Ici, la fête dure 1 bonne semaine avec au programme danses traditionnelles, musique, artisanat… L’énorme tianguis (marché) artisanal est installé sur la place principale. Il faut savoir que le Michoacan n’a rien à envier à Oaxaca en matière de savoir-faire. Ici, de nombreuses familles des alentours s’installent la semaine pour proposer leur travail : céramiques, bois sculpté et peint, vannerie, tissus, cuivre, guitares, masques, ici aussi, chaque communauté (ou presque) a sa spécialité. Et le marché nous permet d’en avoir un bel aperçu.
Mais pour cette première journée, nous préférons nous consacrer entièrement aux festivités. Nous partons donc à pied du centre pour rejoindre l’embarcadère à quelques kilomètres de là. La ville grouille de gens déguisés et maquillés en Catrín et Catrinas, cette figure centenaire emblématique de la culture mexicaine qui, à l’origine, est apparue dans un journal pour parodier les indigènes devenus riches et reniant leurs origines, en représentant un squelette en tenue que porte la haute société. Des couronnes de Cempasuchil en tout genre ornent les coiffures des dames, le spectacle est magnifique, les couleurs incroyables.
Ici, le rituel est le suivant : la panthéon (cimetière) est couvert d’offrandes et de fleurs de Cempasuchil d’un orange flamboyant, censées guider le défunt jusqu’à l’autel où sa famille lui a préparé ses plats et boissons préférés, ses jeux et affaires personnelles…
Chaque foyer dispose de son autel avec ses ancêtres en photo, directement devant la maison dans la rue ou dans le foyer. C’est très touchant de se promener et de voir les portraits de famille sur ces structures colorées et décorées de papel picado, fleurs, bougies, encens, jouets, nourriture, à la vue de tous, sans aucun tabou.
Le 1er novembre est le point culminant de la fête. Ce jour-là, de nombreuses lanchas partent des quais de Patzcuaro pour l’île de Janitzio. Si vous y allez en journée, vous n’attendrez que 20 à 30 minutes pour prendre le bateau. Mais si vous y allez en soirée, là ce sont plus de 2 heures d’attente. Car le rituel est surtout beau la nuit, vers 22H, quand les habitants marchent vers le cimetière avec leurs torches et bougies, tandis que le lac reflète les lumières et que les pêcheurs font leurs rituels sur leurs barques éclairées. Cette nuit-là, les familles se regroupent autour de la tombe de leurs défunts et y campent littéralement, mangeant, buvant toute la nuit, entre chants, prières et anecdotes sur les êtres chers disparus. Certains font même venir des groupes de musique pour distraire leurs morts !
Dès notre arrivée sur l’île commencent les danses traditionnelles de « vieillards ». Il s’agit en fait de jeunes gens portant des masques de vieillards. Chaussés de semelles en bois, ils font des « claquettes » vêtus d’une tenue traditionnelle avec un chapeau de paille couvert de rubans colorés. Ensuite, nous montons au monument qui culmine l’île par le chemin tout tracé jalonné de boutiques souvenirs, de puestos de nourriture et de cocktails pour se donner du courage… et il en faut ! C’est que la côte est raide pour arriver aux pieds de la statue de José María Morelos. Mais cela vaut le coup, la vue y est superbe. José María Morelos était un héros de la campagne pour l’indépendance du Mexique. Sa statue monumentale de 40 mètres de haut se dresse sur le point culminant de l’île, et il impressionne déjà quand nous en approchons en bateau.
Mais comme souvent, victime de son succès, ce n’est vraiment pas, selon nous, le meilleur lieu pour assister au Día de los Muertos. On sent que Patzcuaro et Janitzio ont été engloutis par le tourisme et que cela a perdu de son charme et de son authenticité.
Au contraire, non loin de là, le village de Tzintzuntzan est beaucoup moins touristique et la fête d’autant plus typique. Nous le visitons le lendemain, le 2 novembre, et nous constatons l’ampleur que fut la veillée aux restes en tout genre qui jonchent le sol : bougies encore éclairées, bouteilles, nourritures, la nuit a dû être longue 😊… Certaines familles sont encore au cimetière, sous leurs tentes, en train de discuter et de manger. Ils voient les curieux passer mais ne s’en soucient guère, on sent que rien ne les dérange comme si, en ce jour, c’étaient nous les fantômes…
Le village n’est vraiment pas grand et l’on ne se rend pas compte qu’il fut tout de même la dernière grande capitale de l’empire Purépecha, à l’époque préhispanique. Des ruines en surplomb témoignent de ce passé glorieux. En elles-mêmes, elles ne sont pas très spectaculaires mais elles offrent une vue splendide sur le bassin du lac de Pátzcuaro.
A côté de Tzintzuntzan, nous visitons aussi le village de Capula, LE spécialiste de la Catrina en tout genre : le long marché couvert regorge d’une offre aussi variée qu’étonnante de catrinas en terre cuite de toutes tailles et de toutes les couleurs.
Nous nous attardons également pour manger dans un autre village voisin, Quiroga, où nous voyons une fois de plus les décorations grandioses sur le zocalo du Día de los Muertos.
Aucun outil moderne ne semble avoir sa place ici et même les fours semblent à peine avoir été déblayés d’un chantier de fouille archéologique.
Durant la semaine, nous alternons les visites des villages autour du lac et de Morelia. Nous revenons aussi flâner sur le marché artisanal de Patzcuaro car nous cherchons un style de céramique très particulier que seuls les artisans du Michoacan savent faire : la céramique au négatif. Au marché nous rencontrons les œuvres de la famille Solis Hernández et nous apprenons que cette technique est la spécialité des habitants de Zinapécuaro, un petit village plus haut à l’Est de Morelia, à l’opposé de Patzcuaro. Rendez-vous est pris, nous irons visiter les ateliers ! Ce village n’ayant pas réellement d’attrait, les artisans exposent directement là où ils travaillent, sauf Don José qui possède une petite boutique en bord de route. Nous sommes invités à l’atelier de la famille Solis, et nous nous rendons compte que c’est littéralement chez eux. Le jeune couple s’affaire car ils préparent leurs pièces pour une grande exposition à Guadalajara, mais ils prennent tout de même le temps de nous expliquer la technique.
C’est là que mes cours d’archéologie ressurgissent et que je fais le parallèle avec les vases grecs, quand j’expliquais aux visiteurs du musée que cette technique au négatif était justement encore aujourd’hui un vrai casse-tête pour les potiers, car peu arrivaient à la reproduire ! Et bien les Mexicains y arrivent ! Et nous comprenons que cet art n’est pas typiquement Grec car ici, ils l’ont hérité de leurs ancêtres préhispaniques. Cela ne fait que quelques années que les artisans mexicains l’ont redécouverte, la sauvant par là-même.
Céramique au négatif
Pour obtenir ces magnifiques décors au négatif, ton sur ton, les céramiques sont enduites d’une barbotine qui s’imprègne et se polit après une 1ère cuisson. Ensuite, le décor est appliqué à l’engobe et la pièce est cuite une seconde fois. Les dessins sont révélés à la sortie du four par effet d’oxydation, comme si l’engobe avait brûlé et laissé une empreinte. Pour que cela fonctionne, il ne faut pas dépasser une certaine fourchette de température : en-dessous et au-dessus, cela ne fonctionne pas. C’est pourquoi peu d’artisans la manient et avant de la peaufiner, il leur a fallu quelques essais et beaucoup d’échecs !!! Cette technique ancestrale retrouvée est aujourd’hui modernisée grâce aux formes délirantes de certaines pièces, et aux décors mêlant tradition et modernité. Beaucoup d’artisans se font connaître lors de concours organisés sur tout le territoire, et ils vendent leurs œuvres, pour certains, à l’internationale. Quelle chance nous avons de pouvoir les rencontrer !
A l’atelier Solis, nous ne les voyons pas travailler en direct. Mais après avoir fait un tour à la boutique de Don José, nous allons visiter l’atelier et là, nous faisons un bond dans le temps : une fois passé le portail d’entrée, de petites cabanes en brique sans fenêtres avec des toits de tôle s’enchaînent, dans lesquelles chaque artisan est affairé à sa tâche. Nous nous serions crus tout droit retournés dans le passé : aucun outil moderne ne semble avoir sa place ici et même les fours semblent à peine avoir été déblayés d’un chantier de fouille archéologique.
Toutes les tâches sont réparties : de celui qui prépare l’argile à celui qui la cuit, en passant par celui qui la modèle ou la tourne, celui qui l’assemble et celui qui la décore. Nous discutons avec l’un d’entre eux qui nous explique la difficulté de cet art. Il nous montre quelques pièces qui n’ont pas résisté à la cuisson et qu’ils vont devoir briser et jeter en fin de journée, dont un vase magnifique qui s’est malheureusement fêlé dans l’ultime étape. Nous ne voyons rien au début puis il nous montre un endroit où une fissure superficielle est apparue sur 5 cm. En plaisantant nous lui disons « si vous la jetez, nous l’emportons ! ». Et à la fin de la visite c’est avec toute la gentillesse qui caractérise les Mexicains qu’il nous la tend, en nous disant « je vous l’offre ». Nous lui proposons de lui donner un petit quelque chose pour le temps qu’ils ont passé dessus mais il n’a rien voulu savoir ! « Nous allions la jeter, alors si ça vous fait plaisir, c’est cadeau !!! » Incroyable, nous repartons comblés.
Pour compléter notre visite du Michoacan, nous ponctuons la semaine par des excursions dans la ville magique de Morelia. Nous y séjournons dans une superbe maison ancienne, proche du centre, organisée autour d’un patio avec une fontaine. Nous y serions bien restés quelques jours de plus tant le lieu est apaisant, avec son jardin à l’arrière et sa décoration typiquement mexicaine. Très bien placée, elle nous permet de visiter Morelia à pied, sur plusieurs jours, et de profiter aussi des bars et restaurants, avec petit concert de Cumbia pour conclure le séjour.
Outre l’aqueduc, la place centrale, les allées et le Callejón del Romance, le Santuario de Nuestra Señora de Guadalupe mérite vraiment qu’on s’y arrête, même rapidement, pour son décor incroyable ! Morelia a un charme tout particulier, l’architecture y est magnifique, nous passons les pas de porte pour jeter un coup d’œil dès que cela est possible et c’est comme ça que nous découvrons de petites perles, comme l’université et son cloître. Les cours et patios invitent à la détente, beaucoup de restaurants et de bars y sont installés et nous en faisons le tour, parfois simplement pour un petit café ou chocolat chaud et pour profiter encore et autant que possible de cette atmosphère mexicaine que nous aimons tant.
Nous avons eu la chance de visiter l’État du Michoacan, de savourer sa culture et son histoire fascinantes, et nous y avons découvert el Día de los Muertos, une célébration très touchante dont les racines préhispaniques dévoilent la force du passé et sa grande influence sur les croyances contemporaines. Voir la manière dont les Michoacanos rendent hommage à leurs défunts, dans la communion, la joie et la fête, voir toutes ces couleurs et ces décorations dans les cimetières, cela nous a laissé pensifs quant à nos coutumes européennes bien sombres sur le sujet…
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2 Commentaires. En écrire un nouveau
Leurs rites funéraires me parlent vraiment. J’en ressens une belle harmonie des énergies . Ce qui impressionnant c’est la quantité de fleurs utilisées !!! Question : combien de temps sont laissés les autels ? Merci à vous deux pour ce voyage immobile 😘
Très beau reportage…